M. VARGAS LLOSA, TIEMPOS RECIOS [Des temps difficiles], Debolsillo, 2020.

Le dernier ouvrage de Vargas LLosa a paru en pleine pandémie et, par conséquent, n’a pas encore été traduit en français.
Il fait partie des livres politiques, conçus comme un mélange entre essai et roman historique sur les luttes de pouvoir pour diriger ces pseudo-républiques bananières dont le parangon est le Guatémala dirigé en sous- main par la toute puissante United fruit.
Et le président qui a eu la mauvaise idée de mettre en question le rôle de cette multinationale et de mettre en place une ébauche de démocratie sera vite expulsé du pouvoir comme le fut le Coronel Arbenz en 1958, qui avait eu l’outrecuidance de lancer une réforma agraire au début de son éphémère présidence et d’imaginer de faire rentrer l’United Fruit dans la légalité en la contraignant à payer des impôts, à respecter les ouvriers et à admettre l’existence de syndicats.
Cette chronique de la mort annoncée d’une démocratie en Amérique latine a été admirablement narrée par Miquel Ángel Asturias dans Week-end au Guatemala, Albin Michel, 1959, dont je conseille la (re)lecture
Vargas LLosa revient sur ces épisodes en en découvrant les coulisses encombrées de rivalités tant privées que politiques avec l’omniprésence des Etats-Unis et des frères Dulles, la complicité d’une presse manipulée et sur les précautions que prennent les « gringos » pour que l’ONU ne les accuse pas d’être les véritables exécuteurs (et surtout les financiers) de la future guerre de libération de la première république communiste au service de Moscou en Amérique latine à laquelle on prête jusqu’à l’intention de s’emparer du Canal de Panama.
Les Etats-Unis peuvent toujours compter sur la United Fruit, mais aussi sur l’aide de pays voisins (La république Dominicaine de Trujillo, le Nicaragua de Somoza, le Salvador, qui rechignent un peu à suivre le mouvement et le Honduras qui abritera des camps d’entraînement sur son territoire…)
Il est aussi question dans cette chronique du racisme des dirigeants qu’ils soient des mandataires politiques ou des petits chefs d’entreprises.
Et, évidemment, le règne de la corruption se manifeste à tous les niveaux.