Paco López Mengual, El mapa de un crimen

February 8, 2021
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El mapa de un crimen [Cartographie d’un crime] de Paco López Mengual (1962) Maeva, 2009 est la novélisation d’un fait-divers survenu en 1952, l’assassinat en plein jour et en pleine rue de Joaquín Maqueda, le pharmacien du village, par Matías Cervantes, son rival amoureux. A partir de ce fait-divers somme toute relativement banal – l’issue bête et tragique d’un triangle amoureux – que sa mère lui racontait quand il était enfant, López Mengual va tisser un roman surprenant, passionnant qui accroche le lecteur dès les premières lignes bien que, à l’instar de Chronique d’une mort annoncée de García Márquez, le crime, l’identité de l’assassin et son mobile soient connus dès les premières pages,… du moins en apparence.

Le pharmacien étant un ancien pilote des brigades internationales assigné à résidence et son assassin un ancien de la División Azul, frustré de n’être que le simple commis d’un barbier et de devoir subir l’humiliation d’être payé par un patron au passé républicain[1], il pourrait y avoir des raisons politiques subjacentes, ce qui explique la circonspection des habitants de la petite ville qui ne veulent y voir qu’un crime passionnel.

Le décor est celui d’un bourg perdu de province, un espace clos, avec son café, ses bigotes, ses cancans, ses secrets de famille, ses superstitions qui permettent d’expliquer ce qu’on ne comprend pas, … et son innocent, Adolfo, qui consigne scrupuleusement sur un plan les événements survenus dans le village : l’endroit où est passé Franco, la maison où est né le curé, … et l’endroit où fut assassiné Maqueda.

Le roman est structuré sous la forme de chapitres brefs un peu à la manière de séquences cinématographiques qui s’enchaînent sans ordre apparent, avec des flash-backs, des panoramiques, des voix off,…

L’auteur jongle habilement avec les instances narratives : la troisième personne pour décrire objectivement le village et son quotidien, la première personne quand le narrateur raconte ses démarches pour reconstituer les événements, la première personne encore dans les lettres que Matías écrit à sa soeur du fond de l’hôpital psychiatrique où il est enfermé.

Ce jeu avec l’ordre chronologique, cette construction en forme de puzzle que le lecteur devra reconstituer font émerger petit à petit un aperçu des événements qui se sont déroulés depuis le jour du crime en 1952 jusqu’au dénouement inattendu (mais pas déroutant pour le lecteur attentif) cinquante ans plus tard, lorsque le narrateur boucle son histoire. Une histoire qui n’est pas tout à fait celle que sa mère lui racontait, une histoire où les protagonistes sont plus complexes qu’on ne le pensait, une histoire qui va bien au-delà d’une banale affaire d’un triangle amoureux qui se termine mal ou de séquelles d’un antagonisme idéologique.

Paco López Mengual est un personnage hors du commun. Après des études universitaires, il a repris la mercerie de ses parents où il continue à travailler. El mapa de un crimen est son deuxième roman et un coup de maître à la hauteur des Saints Innocents de Delibes ou de La famille de Pascual Duarte de Cela.

Une première version avait été publiée auparavant dans une petite maison d’édition locale sous le titre El vuelo del mosca[Le vol de la mouche], allusion au type d’avion qu’utilisaient les Brigades internationales, avion aux commandes duquel se trouvait Maqueda quand il fut abattu près du village.

[1] P. López Mengual, El mapa de un crimen, pág. 17.

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